A. LES IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX
ASSOCIÉS AUX DATACENTERS
Selon l’ADEME, le numérique a une part comprise entre 3 et 4 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) mondiales (14). Cela représente environ 1,5 Gt de kg équivalent CO2 rejeté dans l’atmosphère en un an, soit autant que l’Inde, pour la totalité de ses activités et de sa population de 1,4 milliard d’habitants en 2022.
La quantification de l’empreinte environnementale du numérique est un sujet complexe au vu de la multiplicité et de la diffusion des sources d’impacts. Un système numérique fait appel à divers tiers architecturaux :
- Les terminaux utilisateurs (ordinateurs, tablettes, smartphones, objets connectés) ;
- Au moins un Datacenter (lui-même composé de nombreux équipements) ;
- Des réseaux de télécommunications (ADSL, fibre optique, 3G, 4G, 5G, satellites…).
Chacun de ces tiers, et des équipements qui le composent, génère des émissions de GES à chaque étape de son cycle de vie. Il est aujourd’hui reconnu que la fabrication des terminaux utilisateurs est la première source d’émissions, suivie par la consommation électrique de ces derniers durant leur phase d’utilisation (15).
L’étude de L’ADEME et de l’ARCEP 2022 montre que la phase de fabrication est responsable de la majorité des impacts pour chaque indicateur étudié.
En considérant l’ensemble de leur cycle de vie, les Datacenters seraient responsables de 4 à 20% des émissions du secteur numérique, une part équivalente à celle des réseaux de communication (16).
Prévoir la tendance de la consommation énergétique des Datacenters s’avère complexe étant donné la multiplicité des effets positifs : réduction du PUE, amélioration de l’efficacité énergétique et du taux d’utilisation des serveurs, augmentation de la part des énergies renouvelables dans le mix électrique… ; et négatifs : croissance du trafic, du volume de données à stocker, des opérations, de la demande…
D’un point de vue environnemental, le Datacenter concentre de nombreux flux, entrants et sortants, permettant d’assurer son fonctionnement. Le schéma ci-dessous représente les principaux flux dissociés selon qu’ils soient associés à la partie «infrastructure», «informatique» ou «services».
Ainsi, la consommation énergétique totale des centres de données est tributaire des consommations des différents postes : la partie informatique et la partie infrastructure.
Un Datacenter, comme tout site et structure, va impacter l’environnement sur toutes les étapes de son cycle de vie.
Lors de la fabrication et la construction plusieurs éléments vont impacter l’environnement :
- Les matériaux
écosystèmes, ou à cause d’un besoin colossal en énergie.
- Le transport
- La surface au sol
- Le rejet de substances
déchets dans le sol et dans l’eau.
La fin de vie d’un Datacenter impacte aussi l’environnement, et ce sur plusieurs points :
- Les DEEE
environnementaux lorsqu’ils ne sont pas traités par des filières agréées.
- Le bâtiment
Il y a plusieurs étapes associées à la fin de vie. Elles sont classées dans l’ordre de priorité suivant pour limiter au maximum les impacts environnementaux :
- La réutilisation
- Le recyclage
- La valorisation énergétique
- L’élimination
TRAJECTOIRE DE LA CONSOMMATION D’ÉNERGIE DES DATACENTERS
Pour commencer, l’efficacité énergétique du matériel s’est considérablement améliorée. D’autre part, elle reflète le passage progressif des anciens centres de données exploités par les entreprises traditionnelles, telles que les banques, les compagnies d’assurance ou les détaillants, vers les services de cloud computing.
Finalement, la troisième raison est l’augmentation et la migration vers les hyperscalers (17) qui ont contribué à réduire la consommation d’énergie. Ces hyperscalers utilisent des systèmes de refroidissement plus performants et utilisent des serveurs sur mesure (à l’instar des géants du cloud tels qu’Amazon et Google). Ils utilisent également des serveurs issus du projet OpenCompute (18), qui sont nativement conçus pour être efficients dans leur consommation d’énergie.
Ainsi selon ces auteurs, la consommation énergétique des Datacenters serait largement surévaluée et les méthodes d’évaluation de cette consommation ne tiendraient pas compte des fortes tendances compensatoires en matière d’efficacité énergétique qui se sont produites en parallèle.
La tendance à la stabilité de la consommation d’énergie des Datacenters est également corroborée par l’IEA (19). Selon ce rapport, malgré la hausse de la charge de travail, les consommations énergétiques sont restées stables notamment en raison des gains d’efficacité opérés par les constructeurs sur leurs composants et machines.
Ce constat n’est pas l’avis de la commission pour qui l’augmentation des services et des usages « est si forte qu’elle a plus que neutralisé les gains d’efficacité notables réalisés à tous les niveaux (matériel, logiciels, infrastructure des centres de données) ».
Au-delà de ces différences de chiffres et de périmètres, retenons que le consensus qui semble se dessiner est qu’il existe de « nombreux » Datacenters efficaces et que la filière Datacenter a le mérite d’avoir mis le sujet d’efficacité énergétique en priorité grâce à la promotion et l’implémentation des bonnes pratiques d’efficacité énergétique que nous verrons dans la suite de ce document.
LE SUIVI DE PERFORMANCE ÉNERGÉTIQUE ET ENVIRONNEMENTAL,
Pour suivre la performance énergétique et environnementale d’un Datacenter, il faut sélectionner les indicateurs les plus pertinents au regard de ses caractéristiques : son activité, sa disponibilité, sa surface, sa densité électrique, et sa localisation. Toutefois, certains indicateurs, mesurés, calculés ou globaux, sont incontournables pour le suivi de la performance.
LE SUIVI DE PERFORMANCE ÉNERGÉTIQUE ET ENVIRONNEMENTAL,
UN ENJEU ESSENTIEL
L’énergie est pour le Datacenter un enjeu essentiel. C’est aussi le plus connu et le plus tangible. Un approvisionnement continu, maîtrisé et sécurisé d’énergie de haute qualité est indispensable à son fonctionnement. Ce sujet est au cœur de la stratégie du Datacenter, d’autant plus qu’il représente en moyenne 70 à 75 % de ses coûts d’exploitation.
Les Datacenters sollicitent plusieurs types d’énergie finale : de l’électricité, mais également du fioul pour assurer le secours électrique en cas de coupure, et parfois de l’eau glacée ou du gaz.
Le paramètre prépondérant, le plus facile et évident à observer, est donc la consommation d’énergie finale, notamment d’électricité, du site. Elle est mesurée à plusieurs points du Datacenter.
The Green Grid, consortium d’acteurs dédié au progrès de l’efficacité énergétique des Datacenters et des écosystèmes informatiques des entreprises a publié de nombreux livres blancs proposant de nouvelles métriques afin de mesurer et de comparer les impacts des Datacenters.
The Green Grid est ainsi à l’origine de l’indicateur le plus connu et reconnu pour évaluer la performance énergétique d’un Datacenter : le PUE, Power Usage Effectiveness. Cet indicateur est défini et cadré depuis 2016 par la norme ISO/IEC 30134-2. Il mesure le rendement énergétique global du Datacenter.
Il se calcule d’après la formule suivante :
Ainsi, plus le PUE est proche de 1 et plus le site est performant.
Plus cet indicateur est proche de 1, plus le site est performant. À titre d’exemple, un PUE de 1,4 signifie que lorsque 1kWh est consommé par un équipement IT, 0,4 kWh sont nécessaires pour assurer le maintien en condition opérationnelle de cet équipement.
Le CUE, Carbon Usage Effectiveness, est un indicateur élaboré par The Green Grid dans l’idée de promouvoir le développement durable dans le secteur des Datacenters.
Le CUE détermine les émissions directes de gaz à effet de serre (en kg CO2 équivalent) liées à la consommation d’énergie du Datacenter ramenées par kWh d’électricité consommée par les équipements informatiques. Fortement tributaire du mix électrique utilisé, le CUE démontre du meilleur niveau de sobriété environnementale lorsqu’il approche 0[6].
Le WUE, Water Usage Effectiveness, représente les consommations d’eau du Datacenter ramenées
par kWh d’électricité consommée par les équipements informatiques.
par kWh d’électricité consommée par les équipements informatiques.
On différencie le WUE direct, qui ne prend en compte que les consommations d’eau liées aux procédés de traitement d’air et de climatisation, du PUE indirect, qui intègre les consommations d’eau liées à la production de l’énergie.
Un peu moins utilisé, le COP, Coefficient of Performance, permet de mesurer le rendement de la production de froid, en vue de l’optimiser. En cours de normalisation, il est défini comme tel :
Le REF, Renewable Energy Factor, mesure la part d’énergie renouvelable (en production locale ou achat extérieur) par le Datacenter. C’est un indicateur normalisé (ISO/IEC 30134-3) qui se calcule comme suit :
D’autres indicateurs énergétiques existent et sont en voie d’être normalisés, tels que l’ERF (Energy Reuse Factor), le SEER (Seasonally adjusted Energy Efficiency Ratio) ou l’ITEE sv (IT Equipement Energy Efficiency for servers)…
Pour rappel, une liste des indicateurs de performance environnementale des Datacenters a été réalisé par l’AGIT, en collaboration avec France Datacenter et le Gimélec) - Les KPI des Datacenters (alliancegreenit.org).
Les indicateurs PUE, le CUE et le WUE prennent seulement en compte la phase d’utilisation de la partie infrastructure bâtimentaire du Datacenter. Ces indicateurs ne sont donc pas suffisants si l’on souhaite évaluer la performance environnementale du Datacenter dans sa globalité.
Le PUE par exemple est influencé par les paramètre suivants :
À titre d’exemple, un Datacenter avec un très bon score de PUE - pour rappel, proche de 1 - pourra utiliser des équipements informatiques à faible durée de vie et très énergivores, ou des applications très consommatrices en puissance de calcul ou en besoin de stockage, sans que cela n’impacte le score du PUE.
De plus, il ne permet pas de comparer entre eux des Datacenters d’architecture ou d’activité différentes.
Dans un objectif de réduction de l’impact environnemental des Datacenters, d’optimisation de leur dimensionnement et de leurs conditions d’exploitation, il convient aussi d’explorer toutes les opportunités de valorisation de l’énergie fatale qu’ils produisent. Les projets de récupération de l’énergie fatale des Datacenters permettent indirectement d’éviter des émissions de gaz à effet de
serre et font ainsi l’objet d’aides et de subventions particulières.
serre et font ainsi l’objet d’aides et de subventions particulières.
En somme, il existe un nombre important de leviers permettant de réduire drastiquement la consommation énergétique des Datacenters et leurs impacts environnementaux. Dans les chapitres suivants, les bonnes pratiques d’optimisation énergétique des centres de données ainsi que quelques retours d’expérience sur la mise en oeuvre de ces bonnes pratiques, seront présentés.
Par ailleurs, au delà de ces indicateurs, l’AGIT recommande un certain nombre d’indicateurs dans son livre blanc sur les KPI du Datacenter (20). Ce dernier souligne l’importance de mettre en place un suivi d’indicateurs sur les trois couches qui composent un Datacenter : son infrastructure, ses équipements informatiques et télécom et les services qu’il héberge.